mercredi, février 15, 2023

#FFF - les 1001 vies d’Antony GAUTIER, le nouveau patron de l’Arbitrage Français...

Par Eric WIROTIUS-BELLEC archivé dans , , , , , ,


Publié le 15/02/2023 - L’arbitre international, par ailleurs maire de Bailleul (Nord) depuis 2020, a pris la succession de Pascal Garibian le 6 janvier dernier comme directeur de l’arbitrage. Découverte d’un homme aux multiples facettes.






Il a endossé ses nouvelles fonctions lors du stage de trois jours des arbitres professionnels au centre technique national de Clairefontaine (du17 au 19 janvier). À 45 ans, Antony Gautier est depuis le 6 janvier dernier le nouveau patron des arbitres français.

Lors d’un comité exécutif de la Fédération Française de Football, le Nordiste a été nommé directeur de l’arbitrage, succédant ainsi à Pascal Garibian, en poste comme directeur technique pendant presque dix ans, mais débarqué en novembre dernier. Il est entouré de Stéphane Lannoy, nommé directeur technique en charge de l’arbitrage professionnel, de Stéphanie Frappart, directrice technique en charge de l’arbitrage féminin, et d’Alain Sars, directeur technique en charge de l’arbitrage amateur.

Seize ans de Ligue 1

Durant la trêve liée à la Coupe du monde au Qatar, quatre candidats (Gautier, Lannoy, Sars et Ennjimi) avaient été auditionnés par un jury comprenant cinq membres du Comex fédéral. Et finalement le projet présenté par Antony Gautier a emporté la majorité des suffrages. Un nouveau challenge s’offre pour celui qui officiait en Ligue 1 depuis seize ans (263 matchs dirigés).

Il arrive en poste à un moment très difficile pour l’arbitrage français sous le feu de nombreuses critiques. L’une des plus récentes était intervenue lors de la 19e journée de L1, le 15 janvier 2023. Damien Comolli, le président du Toulouse FC, s’était alors emporté contre l’arbitrage après une prétendue faute sur le premier but concédé par son équipe contre Brest (1-1).

« C’est le symbole de quinze ans d’arrogance et de médiocrité de l’arbitrage français, dont je suis persuadé que M. Gautier sera le digne héritier, fulminait le patron du TFC. Nous avons tout faux, les arbitres ont tout faux, le football français a tout faux. J’ai été une des personnes les plus vocales pour qu’il y ait un changement à la tête de l’arbitrage mais malheureusement il n’y en aura pas. On ne peut pas changer la culture de l’arbitrage – dont on a absolument besoin – avec les mêmes personnes. »



Grands débuts à 11 ans !

Le nouveau boss de l’arbitrage tricolore a pourtant su jongler avec brio dans plusieurs activités depuis de nombreuses années. Né à Seclin (Nord), il démarre le foot à l’âge de 8 ans au SC Bailleul. L’apprenti gardien de but se passionne rapidement pour l’arbitrage.

À 11 ans, il commence même de façon non officielle en étant arbitre de touche lors des matchs de son père en Ufolep (Union française des œuvres laïques d’éducation physique) le dimanche matin.

« C’est le symbole de quinze ans d’arrogance et de médiocrité de l’arbitrage français, dont je suis persuadé que M. Gautier sera le digne héritier, fulminait le patron du TFC. Nous avons tout faux, les arbitres ont tout faux, le football français a tout faux. J’ai été une des personnes les plus vocales pour qu’il y ait un changement à la tête de l’arbitrage mais malheureusement il n’y en aura pas. On ne peut pas changer la culture de l’arbitrage – dont on a absolument besoin – avec les mêmes personnes. »

Quatre années plus tard, il décide de raccrocher les gants pour prendre le sifflet en démarrant comme arbitre de district avant de gravir un à un les échelons.

Il dirige son premier match en L 1 en 2007 puis participe à des rencontres internationales et de Ligue des champions. « C’est une personne droite, honnête, intègre qui n’avait aucune difficulté lors des tests physiques, loue un de ses anciens arbitres assistants, David Benech. Antony était sûr de lui. C’est quelqu’un de discret et travailleur qui ne se met jamais en avant, en préférant toujours valoriser son équipe. »



Une thèse de maths en 2004

Au niveau de sa scolarité, ses résultats sont brillants. Il soutient une thèse de doctorat en mathématiques en 2004 avant de devenir maître de conférences dans cette discipline à l’université de Lille. En 2014, ce père de trois enfants est sollicité par Martine Aubry pour figurer sur sa liste lors des élections municipales de Lille.

« Je me suis toujours intéressé au débat citoyen et à la façon dont on peut améliorer le quotidien dans une ville, confiait-il dans nos colonnes en juillet 2020. L’élection présidentielle de 2002 a agi sur moi comme un électrochoc (victoire de Jacques Chirac au 2e tour contre Jean-Marie Le Pen). On ne peut pas subir sans décider d’agir. Cela m’a davantage motivé à comprendre l’engagement citoyen et défendre des valeurs et des convictions. »

Élu en mars 2014, il est choisi par Martine Aubry pour occuper les fonctions d’adjoint au maire de Lille délégué au sport. Il promeut alors une politique sportive basée sur le sport éducatif et sur le sport pour la santé à tous les âges. L’édile décide même d’étendre sa délégation en 2017 pour y intégrer les universités, l’enseignement supérieur, les grandes écoles et la recherche.

Très engagé dans la vie locale à Bailleul (Nord), Antony Gautier décide d’être candidat à la mairie de cette commune de 15 000 habitants en 2020. Sans étiquette, il l’emporte en enregistrant 50,3 % des suffrages dans une triangulaire qui l’opposait à l’écologiste Joël Decat (22,4 %) et au maire sortant Marc Deneuche (27,3 %) au second tour. Il devient vice-président de la communauté de communes de Flandres intérieure.




« Antony a réussi à séparer avec réussite ses vies. Il possède un flegme permanent tout en étant toujours empreint de beaucoup de sérénité et de calme, déclare Valentin Belleval, maire de Hazebrouck et président de la communauté de communes de Flandres intérieure. Il accepte volontiers la contradiction. C’est un homme de gauche qui assume ses convictions et moi je suis un homme de droite, mais on se rejoint sur l’essentiel et on est d’accord sur presque tout, notamment la vision qu’on partage du territoire. Il accepte qu’on lui dise que ce n’est pas possible et qu’on lui démontre pourquoi. C’est son côté cartésien de prof de matchs. »

Le politicien poursuit. « Il a une grande exigence vis-à-vis de lui-même et il attend la même exigence vis-à-vis des autres. Il a une grande hygiène de vie. Antony me dit qu’il évolue dans un monde où le droit à l’erreur n’est pas permis et il doit toujours garder sa lucidité dans les décisions qu’il prend. Il possède une bonne équipe et des gens autour de lui. La marque d’un patron est d’être bien entouré. »

Son dernier match ? Un barrage de folie entre Saint-Étienne et Auxerre

En fin de saison dernière, il achève sa 15e année au plus haut niveau (263 rencontres au sein de l’élite) en officiant lors du barrage retour entre Saint-Étienne et Auxerre (1-1, 4-5 aux t.a.b.) qui propulse le club icaunais en L 1. Il ne le sait pas encore mais ce sera son dernier match. Victime d’une déchirure aux ischio-jambiers lors des tests physiques à Clairefontaine fin juillet, il se retrouve alors immobilisé et pense à sa reconversion. Certains le sondent pour s’impliquer davantage dans l’arbitrage avant qu’une opportunité se présente avec le départ de Pascal Garibian.

« Il sait quelles mesures pour l’arbitrage il faut garder, modifier et créer, estime David Benech. Après, arrivera-t-il à les mettre en place ? Est-ce que la volonté fédérale l’accompagnera ? Là est toute la question. En ayant quitté l’arbitrage il y a quelques jours, il se trouve au plus près de l’actualité et des problématiques des arbitres sur tous les points : social, fiscal mais aussi technique, physique et psychologique car ce n’est pas facile de consacrer sa vie à l’arbitrage. Il a sûrement des solutions à apporter et j’espère qu’il pourra les mettre en place pour satisfaire le football, les arbitres et l’arbitrage. »




Eric WIROTIUS - ARBITREZ-VOUS
Source LE PARISIEN - Arnaud Detout