Publié le 01/04/2018 - Réputé comme l'un des meilleurs arbitres français, le Picard, qui dirigeait le dernier OM/OL, regrette le dénigrement de sa corporation...
AMIENS - Rasé de frais, les ongles rongés par le stress, Ruddy Buquet est un coriace qu'on ne peut pas prendre en défaut de partialité. Un professionnel sans affect qui «arbitre une équipe A contre une équipe B, les Bleus contre les Rouges», capable, sans trembler, d'expulser Neymar lors d'un Classique ou de revenir sur un penalty qu'il avait accordé pendant Rennes-Guingamp. Habitué des matches prestigieux de L1, il avance «un devoir de réserve» quand les noms d'Aulas, Antero Henrique ou de Chapron sont avancés, autant pour ne pas insulter l'avenir que pour ne pas prêter le flanc aux critiques. Un discours bien rodé qui laisse pourtant transpirer la lassitude de voir sa corporation constamment visée par les analyses plus ou moins lucides des observateurs. Un discours contraint de respecter une hiérarchie (la FFF et la Direction technique de l'arbitrage) qui ne fait pas de la communication une priorité chez les arbitres. Dommage.
«Vous n'êtes pas un acteur direct du jeu. Dans quelle mesure prenez-vous alors du plaisir à arbitrer ?
C'est une autre fonction, mais on n'est pas frustrés. Le plaisir, je l'ai dans les prises de décision, dans le fait d'être juste et cohérent avec les deux équipes, de diriger une rencontre sans accroc particulier... Chaque rencontre est différente. Ce qui ne change pas, c'est qu'on joue toujours à l'extérieur, ce qui fait le charme de l'arbitrage. (Sourire.) Cela va vous paraître bizarre, mais on est satisfaits quand on ne parle pas de nous. On cherche à être discrets contrairement à un buteur qui aime qu'on parle de lui, de ses statistiques. Nous, il ne faut pas que nos stats apparaissent.
Vous vous trouvez pourtant souvent au centre des passions, des pressions...
On est un peu hermétiques à tout ça.
Vous êtes dans la maîtrise des émotions...
Visuellement, cela ne se voit pas qu'on prend du plaisir, mais c'est le cas. Après une décision, on pense déjà à la suite : on peut faire quatre-vingt-neuf ou quatre-vingt-dix minutes correctes et tout perdre dans les arrêts de jeu avec une décision préjudiciable pour l'une des deux équipes. C'est ce qui est dur. Mais on prend du plaisir pendant le match, avec ce devoir d'être parfait jusqu'au bout. L'arbitrage, il faut le vivre pour le comprendre, c'est une école de la vie.
Vous n'êtes pas toujours appréciés des supporters, des joueurs, des entraîneurs, des présidents... Vous sentez-vous seuls au monde ?
On n'est pas seuls au monde, mais on a une fonction qui est fortement décriée, on aimerait que cela se passe autrement, car nos erreurs sont jugées, analysées. Un entraîneur, vis-à-vis d'un joueur qui rate une passe,...
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