Il n'y a pas si longtemps, le rugby pouvait se targuer d'être un sport à part où le respect de l'arbitre, enseigné dès le plus jeune âge, faisait partie de ses valeurs fortes. Or, depuis quelques années, la remise en cause des décisions arbitrales n'est plus l'apanage des supporters. Nombre de joueurs et surtout d'entraîneurs semblent en effet avoir oublié ce qu'ils ont appris à l'école de rugby. Après chaque rencontre, et même pendant, les critiques fusent. En football, on appelle cela de « l'arbitrage bashing », et il tend à se rependre dans le rugby et ce, en dépit des nouvelles mesures de la LNR. Laquelle n'a jusqu'à présent pas vraiment sévi.
Au final, c'est l'image du rugby qui est écorchée. Les enjeux sportifs et financiers ont tellement pris le dessus sur l'humain, que l'on oublie souvent à quel point il est difficile de recruter des arbitres. Lesquels, et il faut le rappeler, sont avant tout humains. À l'instar des joueurs, ils peuvent commettre des erreurs. Mais est-ce une raison pour les tacler semaine après semaine ? Certains comme Laurent Labit, co-entraîneur du Racing-Métro, ne s'en privent pas, et ce, en dépit des risques de suspension. Suite à la défaite de son équipe dans le derby de la capitale face au Stade Français ce samedi (23-19), l'entraîneur des arrières Ciel et Blanc n'a pas mâché ses mots envers Jacob Van Heerden, l'arbitre sud-africain du match : « Il s'est bien promené cet après-midi aussi, sauf qu'on était là pour faire un match de rugby de haut niveau, avec deux équipes qui voulaient jouer. Malheureusement, il manquait un ingrédient qui est primordial aujourd'hui dans notre sport. Et ça s'est terminé comme tout le monde l'a vu, c'est-à-dire une parodie, un hold-up. » Il a d'ailleurs été convoqué devant la Commission de discipline et des règlements en sa séance du 5 novembre 2014.
Si l'on peut comprendre la déception d'un entraîneur après une défaite, certains trouvent également à redire alors que leur équipe a gagné. C'est le cas d'Olivier Azam, entraîneur du LOU, via le Midi Olympique. Lyon a en effet eu des difficultés à battre Bayonne (24-19), et pour ce dernier, c'est en partie à cause de l'arbitre argentin de la rencontre, M. Pastrana. « Quand un droitier pousse en travers sans être sanctionné, que voulez-vous faire. » Avec humour, il en est même venu à regretter les arbitres français, pourtant souvent égratignés. « Je ne me plaindrai plus de l'arbitrage français. Il est d'un très bon niveau, il travaille très bien. Il devrait même aller donner des conseils en Argentine. »
Du côté de Dax (14e de Pro D2) et de son entraîneur Richard Dourthe, on a beaucoup moins envie de rigoler. L'ancien international évoque « de l'injustice » alors que ses ouailles ne sont pas récompensées comme elles auraient dû l'être compte tenu de leurs efforts face à Biarritz à Aguilera (24-17). Via Rugbyrama, il en appelle à une certaine logique dans les sanctions : « Quand nous sommes en supériorité numérique sur le terrain notamment en mêlée et que l'on pénalise mon équipe pour une faute. Quel est notre intérêt d'amener la mêlée en bas alors que nous avons de multiples choix de jeu par la suite ? » Des décisions qui selon lui ont un impact énorme quand on connaît l'importance de chaque point engrangé à la maison mais surtout à l'extérieur dans ce championnat.
Mais il n'y a pas qu'en Top 14 et en Pro D2 que l'on remet en cause les décisions arbitrales. Un cran en-dessous, on a parfois du mal à digérer certains coups de sifflet, surtout quand on perd à la maison comme Tricastin face à Aubenas (16-26) lors de la 3e journée de Fédérale 1. « On n'est jamais très objectifs quand on réagit à chaud. Mais je pense que l'équipe qui a envoyé le plus de jeu aujourd'hui n'a pas été récompensée, commentait Ludovic Zanini, talonneur du RC Tricastin via Mistral TV. On ne peut pas être arbitrés par des gens comme ça. Ce monsieur s'est bien régalé cet après-midi, il est venu, il a bien mangé avec ses copains et ils nous l'ont bien mis. »
Face à ce type de propos, la LNR a pour le moment choisi de n'appliquer que des sanctions allégées. Plutôt virulent contre l'arbitrage il y a quelques semaines suite à la cinquième défaite de son équipe face à Byaonne, Guy Novès, entraîneur du Stade Toulousain, n'a en effet écopé que d'un match de suspension. Idem pour Fabien Galthié, son homologue du MHR. Quant à Gonzalo Quesada (Stade Français), il n'a seulement reçu qu'un avertissement. Dans d'autres pays, comme ici Afrique du Sud, on n'hésite pas sévir comme en témoigne ce carton rouge adressé au talonneur de Griquas Rayno Barnes lors d'une rencontre de Currie Cup face aux Blue Bulls après une critique vertable de l'arbitre central.
Source : LE RUGBYNISTERE