mercredi, décembre 24, 2014

BELGIQUE - Alexis PONNET : L'Arbitrage belge en pleine évolution....

Par Eric WIROTIUS-BELLEC archivé dans , , , , , , ,


Publié le 24/12/2014 - Alex Ponnet : « L’arbitrage belge est en pleine transformation »

L’ancien arbitre international revient sur l’évolution de l’arbitrage en Belgique au cours de l’année écoulée.

L’année 2014 devait marquer un grand pas en avant dans l’arbitrage belge. La feue commission centrale des arbitres (CCA) a laissé place à un Referee office, censé incarner un plus grand professionnalisme. Mais il ne suffit pas de se donner des accents anglais pour dépoussiérer une institution trop longtemps sclérosée et cependant indispensable au bon fonctionnement de la compétition. Si les clubs ont touché le gros lot avec les derniers contrats TV, l’arbitrage reste le parent pauvre de notre football. Depuis la retraite de Frank De Bleeckere en 2011, les arbitres belges sont absents des grands événements internationaux.

Notamment sous l’impulsion de celui-ci, promu « Elite Referee Manager », et de Paul Allaerts, l’arbitrage a tenté de se donner un petit coup de jeune au cours des derniers mois. Une Commission de review a été instituée et, dans un écho au Mondial brésilien, le spray a fait son apparition, tout comme de nouveaux visages. Une préparation plus professionnelle a été rendue possible, notamment par la mise à disposition d’infrastructures à Tubize. Et tout ce beau monde ira même, début janvier en stage à La Manga (Espagne), à l’instar des joueurs professionnels.

Mais cela n’a pas empêché quelques couacs de dimension, qui font resurgir le débat sur le professionnalisme intégral de cette corporation ou de l’usage de la vidéo. L’ancien arbitre Alex Ponnet, qui avait sifflé aux Coupes du Monde 1982 et 1986, jette un regard lucide et critique sur l’évolution en cours.

Alex Ponnet, comment jugez-vous l’année écoulée du point de vue de l’arbitrage ?

C’est une année mitigée, une année de préparation. L’arbitrage belge est en pleine transformation. La CCA avait décidé de lancer plusieurs jeunes, qui doivent encore s’aguerrir. Cela entraîne inévitablement des erreurs de jeunesse, qui vont se corriger. Il faut juste un peu de patience.

Mais les problèmes ne vont-ils pas subsister tant que les arbitres ne deviendront pas totalement professionnels ?

C’est un débat déjà vieux de 15 ou 20 ans en Belgique. Mais je ne crois pas à un professionnalisme à 100 % dans un pays comme le nôtre. Ce n’est envisageable que dans des grandes nations du football et des plus grands pays. Qui pourrait prendre une telle dépense en charge ? La seule solution, c’est que l’UEFA crée une sorte de centre d’arbitrage permettant de payer des arbitres pro, par exemple 3 ou 4 pour un pays comme la Belgique, qui tourneraient en Europe.

Ces dernières semaines, plusieurs erreurs grossières ont été commises. La vidéo ne s’impose-t-elle pas ?

Encore une fois, il n’y a que 4 ou 5 clubs en Belgique qui pourraient se doter de ce genre d’installation assez coûteuse. Prenez l’exemple de Louvain, à qui on imposerait ces coûts en cas de montée de D1. Qu’adviendra-t-il si le club redescend directement en D2 ? Même la Fifa ou l’UEFA reculent devant ce genre d’investissements. Les erreurs flagrantes auxquelles vous faites allusion sont d’abord des erreurs humaines, certes inadmissibles à ce niveau.



Chaque fois, l’arbitre principal n’a certes pas été aidé par son assistant…

C’est en effet le problème principal. Les juges de touche, comme on les appelait par le passé, sont devenus de véritables assistants auxquels l’arbitre principal est censé faire confiance à 100 %. Si l’assistant se trompe, l’arbitre principal se trompe donc également.

En quart de finale de Coupe de Belgique, on a retrouvé les teams à 6 arbitres. Vous croyez à leur efficacité ?

Au début, j’étais assez partisan, mais je constate qu’il reste toujours des erreurs. Parmi les six arbitres, il y aura toujours un leader dans l’âme, qui ne sera pas forcément toujours l’arbitre principal. Il y a trop d’ego d’un côté, mais aussi un manque de responsabilité de l’autre pour que cela marche réellement. On voit encore trop souvent l’arbitre derrière le but ne pas oser prendre ses responsabilités.

Malgré toutes les consignes de rigueur, les coups de coude ou les tacles dangereux font toujours partie de notre paysage footballistique, comme l’a encore montré l’exclusion du Standardman Eyong Enoh le week-end passé.

Le football sera toujours un sport de contact. Et, dans chaque équipe, il y aura toujours un ou deux joueurs frustrés d’avoir perdu le ballon ou de s’être fait disputer par un équipier ou par son coach.

La Commission de review permet enfin de sanctionner des faits qui auraient échappé à l’arbitre ou que celui-ci aurait mal interprétés.

L’idée est très bonne. Mais ceux qui l’on conçue ne l’ont peut-être pas fait de manière assez professionnelle. Ce n’est pas une question de composition, mais plutôt de communication. Pourquoi par exemple ne pas utiliser Skype pour recueillir les différents avis au lieu de devoir rassembler tout le monde ?

On a l’impression que les arbitres en général communiquent toujours aussi mal.

Je pense qu’il vaut mieux que l’arbitre s’en tienne à un certain devoir de réserve après la rencontre. On lui demande souvent de se justifier sur des phases que les journalistes ont pu, eux, de leur côté, visionner plusieurs fois. Ce qui n’est pas le cas de l’arbitre à qui on demande de s’expliquer à chaud. Ce serait plus judicieux que le délégué de la commission présent au match ose s’exprimer pour couvrir son arbitre.

Vous avez dirigé des finales de Coupe d’Europe et des matchs en phase finale de Coupe du monde. On ne voit pas actuellement quel arbitre belge aura bientôt un tel privilège.

Van de Velde, Verbist ou Gumienny ont sans doute laissé passer leur chance, même si c’est encore eux qui portent de le poids de l’arbitrage dans notre championnat. Des jeunes comme Vertenten, Laforge, Lambrechts voire Visser, qui vient tout juste d’avoir 25 ans, incarnent cet avenir, mais ils doivent encore faire leurs preuves. C’est une bonne chose qu’on lance les arbitres plus jeunes en D1. Moi, j’avais dû attendre la trentaine. Cela peut leur permettre de gagner des galons internationaux plus tôt. Encore faut-il que l’UEFA ne se contente pas de leur donner des matchs en U19 ou U21.

Source : LE SOIR